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Islande 2010

L'Islande à pied du Nord au Sud

 

Traversée de la Nyidalur.jpg

 

Imaginez que vous marchez sur une route et que vous n’entendez que le son d’une canne blanche qui frappe le goudron. Imaginez que vous êtes parti traverser un pays : l’Islande,mais que de ce voyage vous ne verrez rien, ni le ciel ni la terre, aucun visage, aucun paysage.

Cette maladie rare et évolutive,  nommée choroïdite multifocale bilatérale, vous a rendu aveugle, et bientôt c’est à votre ouïe qu’elle s’en prendra. Ainsi, vous ne percevrez plus dans le lointain les heurts de votre canne sur le bitume, le chant des torrents, des cascades ou le son du vent fouettant votre visage. Que vous restera-t-il alors pour apprécier l’univers qui vous entoure ?

Georges Nicolas est allé chercher la réponse à cette question au bout d’un effort surhumain, butant sur chacun des cailloux jalonnant son chemin, ne distinguant du pays traversé qu’un décor en noir et blanc.

 

Sur la F26.jpg

 

Georges marche agrippé à mon bras comme il tient habituellement le harnais de sa chienne guide Thémis. Nous n’avons pas pu l’emmener avec nous pour cette expédition et je deviens les yeux de mon compagnon. Je lui indique les obstacles du terrain et lui décris les zones visitées.

Nous quittons Husavik, ville départ de notre voyage. L’air marin du port des pêcheurs islandais, venu de l’océan des baleines où se confondent l’Atlantique Nord et la mer Arctique, s’atténue sur la route qui mène à l’intérieur des terres.

Nous empruntons la piste F26 qui traverse l’Islande du Nord au Sud, sur près de 300 kilomètres. Qu’importent les distances accomplies. L’essentiel n’est-il pas ce voyage peu banal, vécu ensemble, avec nos deux perceptions différentes de ce drôle d’univers que nous pouvons partager ? Cette différence de perception nous donne parfois l’impression de vivre cette aventure chacun de notre côté, comme si la non-voyance de Georges nous séparait de mille lieues.

 

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​Vingt jours après notre départ, le chahut des vagues au bout d’une vaste plage inspire la fin du voyage. Au sommet d’une butte se profile à l’horizon la bande éblouissante de l'océan agité. Georges se tient à sa canne. À la senteur des effluves marines, il ne peut s’empêcher d’éclater en sanglots, tant l’effort pour atteindre ce but a été éprouvant.

Je lui demande alors : “ Depuis que tu as perdu la vue, qu’est-ce qui t’aide à avancer ? ” Il me répond : “Je marche pour ma femme, mes 2 fils, mes petites filles, ma famille, et mes amis. Je ne connais pas le visage de mes petites filles, je ne le connaîtrai jamais, mais je me l’imagine...”

 

Texte de Philippe Sauve



30/06/2016
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